Maridan-Gyres

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8- Véronique

Début de l'histoire :  http://maridan-gyres.blog4ever.com/presentation-des-quatre-personnages

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illustration : http://www.voyagesotop.com/croisiere-tout-inclus.html

 

Après une courte sieste, elle décide d’aller se baigner. La lecture du cahier de Robert attendra ce soir. Elle opte pour une douche rapide. Après cela, elle ouvre le tiroir de la penderie et extirpe le maillot de bains qu’elle a acheté à Cannes. Comme à son habitude, elle a opté pour un maillot une pièce noir. Une forme sobre, à la limite de l’austérité. Après tout elle est enceinte et elle n’est pas partie en croisière pour se faire berner une fois de plus.

 

Bien qu’il fasse déjà chaud, elle n’a pas mis la climatisation en marche. Elle aime bien la chaleur de sa cabine, c’est comme un cocon qui la protège du monde extérieur. Le thermostat lui indique 28°. Pour la plupart des gens c’est très désagréable, mais pas pour elle. Elle aime quand son corps transpire et que son esprit lâche les amarres. Elle va profiter de ce voyage pour tout oublier. Sans son maquillage, ses cheveux nattés serrés et tirés à l’arrière, elle redevient la souris grise que personne ne remarque jamais. Et en ce moment précis, elle apprécie beaucoup.

 

Allez hop ! Elle s’empare d’un drap de bain et prend le chemin de la piscine. Dès qu’elle arrive sur le pont, elle constate que la température est clémente. Sur le panneau d’affichage de la piscine, il est indiqué que l’eau est à 22°. C’est idéal pour elle, elle aime bien l’effet saisissant d’une eau fraîche après les rayons du soleil. Elle cherche du regard un transat disponible et finit par en trouver un proche du bar. Elle y dépose ses clefs et son drap de bains et plonge avec délice dans l’eau qui lui semble bien fraîche après ces quelques minutes passées au soleil.

 

Il y a peu de monde dans le bassin et cela la réjouit. Tous les transats sont occupés par des gens qui recherchent un bronzage prononcé pour la fin de leurs vacances. Se faire griller la couenne, très peu pour elle. Elle enchaîne les longueurs avec plaisir. Au moment où elle s’apprête à sortir, elle entend une voix amusée qui lui demande si elle s’entraîne pour les jeux olympiques. Etonnée, elle lève les yeux et découvre Yves qui l’observe en souriant.

 

-          Etes-vous trop fatiguée pour nager avec moi ?

-          Non, si vous y allez tranquille. Je peux encore faire quelques longueurs.

-          Ok, allons-y !

 

Yves pose sa serviette pliée au bord du bassin et il s’élance en un plongeon impeccable. Il a un crawl puissant et Véronique a du mal à se maintenir à sa hauteur. Finalement, elle lâche prise et le laisse prendre de l’avance. Après un aller-retour rapide, il adapte sa nage à ses brasses et ils nagent ainsi de concert pendant près de dix minutes. Epuisée, Véronique décide de sortir de l’eau. Un transat s’étant libéré à ses côtés, Yves  vient y prendre place.

 

-          Qu’avez-vous pensé de ce déjeuner ?

-          J’ai trouvé le capitaine très avenant. Il a rapidement su nous mettre à l’aise, ce qui n’est pas toujours évident avec des gens qui ne se connaissent pas. Pour ma part, j’étais un peu stressée.

-          Tu as raison. Moi aussi je l’ai trouvé très sympa et pourtant, je ne me lie pas facilement avec les étrangers, mais ce déjeuner a vraiment été vraiment un bon moment. Et puis j’ai trouvé que notre groupe était très bien composé.

 

Elle apprécie le « tu » spontané du bel Yves. Allons fillette, ne t’emballe pas ! Sa raison la rappelle à l’ordre. Ne pas laisser ses chimères la mettre dans une situation impossible, une fois de plus.

 

-          C’est vrai, moi non plus je ne me lie pas aussi facilement en temps ordinaire, mais là, sans doute à cause des conditions particulières, j’ai trouvé que cela s’était fait naturellement. Que ce soit toi, Patachou ou Tony, j’avais l’impression que nous nous connaissions depuis longtemps. D'aussi loin que je me souvienne, c’est la première fois que cela m’arrive !

 

Yves la regarde sourire. Ce n’est plus la femme qu’il observait à l’embarquement. Elle semble plus détendue. Elle a perdu cet air renfrogné qui habitait son visage lorsqu’il l’avait aperçue. Décidément, les vacances cela a du bon, même pour moi, songe-t-il ! Lui aussi a l’impression que son pas s’est fait plus léger.

 

-          Tu as quelque chose de prévu pour ce soir ? Zut ! Une ombre traverse son visage à nouveau.

-          Je ne sais pas. Non ! Je n’ai rien prévu, pourquoi ?

-          Je voulais te proposer de dîner avec moi, en tout bien, tout honneur. Ensuite, on pourrait se rendre au spectacle.

 

Elle réfléchit un instant. Il l’observe en silence tandis qu’elle y pense. Combien de fois a-t-elle été trahie pour être aussi méfiante ? Elle l’observe attentivement. Il est serein, ne la presse pas et attend sa réponse patiemment. Après tout que risque-t-elle ?

 

-          OK, rendez-vous à dix-neuf heures. Il faut que je me change.

-          Moi aussi, car je ne crois pas qu’ils acceptent les gens en maillot de bain pour le dîner. Nous risquerions de faire sensation.

 

Une fois de plus, il a réussi à la détendre et il se réjouit de voir réapparaître son sourire. C’est sur cette note positive qu’il se retire.

Elle le regarde s’éloigner et se remet à respirer normalement. Il faut vraiment qu’elle apprenne à contrôler sa respiration. Depuis son invitation, elle était en apnée.

 

-          Je suis vraiment trop bête !

-          Allons bon ! Voilà que vous parlez toute seule à présent !

-          Oh ! Bonsoir Patachou, vous me surprenez en pleine méditation. Vous avez bien écrit ?

-          Pas une seule ligne, ma bonne dame. Je me suis endormi comme une masse. Trop de nuits sans sommeil. Je décompresse visiblement.

-          Pas de souci, cela va revenir, j’en suis certaine. L’inspiratin cela va et vient, tous les auteurs le disent. Qu’avez-vous fait d’autre à part dormir ?

-          Et bien, Tony et moi, nous avons joué à ma belote, avec un jeune couple qui passait par là. Cela faisait des années que je n’y avais plus joué. Je me suis bien amusé et je n’ai pas vu le temps passer. Et vous savez quoi ?

-          Non, dites-moi !

-          J’ai gagné ! Pour la toute première fois de ma vie. Je suis fou de joie ! I’m happy ! Je pense que ma nouvelle vie démarre bien et que cela me réussit.

-          J’en suis heureuse pour vous ! Merci ma chère Véronique. Auriez-vous cinq minutes de libres à consacrer au vieil homme que je suis ?

-          Cela dépend ! Quelle heure est-il ?

-          Dix-sept heures trente, pourquoi ?

-          Parce que je me suis engagée pour ce soir, mais j’ai une demi-heure de disponible, si cela vous convient !

-          Alors, je vous invite à fêter ma victoire de cet après-midi.

-          Avec plaisir ! Allons-y.

-          Vous m’en voyez charmé, ma chère !

 

Et Patachou d’effectuer devant une Véronique amusée, une révérence clownesque qui lui arrache un éclat de rire joyeux. Elle aime beaucoup les manières un peu surannées du vieil homme. Avec lui, elle n’a pas peur. Arrivé au bar, il lui tire de manière très vieille France sa chaise, et attend qu’elle prenne place pour la remettre en place. Les hommes, d’aujourd’hui, ne pratiquent plus ce genre d’attentions délicates qui montraient aux femmes à quel point elles comptaient pour eux. Cette élégance est moquée de nos jours.

Il commande un Gin tonic et elle un Jet 27. Tandis que l’alcool irrigue son corps d’un apaisement salvateur, elle se met à rire aux descriptions rocambolesques de son compagnon qu’elle trouve de plus en plus drôle.

 

-          Allez, je vais cesser mes sottises, car je vais finir par vous mettre en retard. Il est dix-huit heures et si je me souviens bien, c’est à cette heure que je devais vous libérer.

-          En effet, j’ai rendez-vous à dix-neuf heures. Une heure pour me doucher et me préparer c’est parfait !

-          Une heure pour tout faire ! Mais vous êtes la femme parfaite. La mienne, il lui fallait une heure pour se laver. Une heure pour se maquiller, et pas loin de deux heures pour réussir à s’habiller. C’était toujours un calvaire pour être à l’heure. Allez partez vite avant que je me remette à radoter sur ma vilaine ex-femme.

-          Cessez de me flatter, vous allez finir par me mettre en retard.

-          Tout homme serait heureux de vous attendre, ma chère ! Allez, filez, je vous rends votre liberté, et je vais noyer mon chagrin dans l’absinthe.

 

Le clin d’oeil qui lui a fait en disant sa tirade lui a arraché un nouvel éclat de rire. Elle dépose un baiser sur sa joue parcheminée.

 

-          Si vous êtes libre demain matin, c’est moi qui vous invite pour le petit-déjeuner.

-          Ce sera avec plaisir !

-          À quelle heure, je vous attends ?

-          Disons vers neuf heures.

-          Ce sera parfait. Votre serviteur sera là, frais et disponible. Bonne soirée Véronique.

-          Merci, Patachou, merci pour ce délicieux intermède.

-          Merci à vous, jolie madame.

 

Amusée, elle se sauve en déposant un gros baiser sonore sur la joue du vieil homme ravi qui lui montre un deux avec ses doigts.

 

-          Deux baisers c’est un bon début ajoute-t-il en riant. J’ai de la chance, j’ai eu du rab. Elle s’éloigne vite en riant encore.

 

http://maridan-gyres.blog4ever.com/9-dsetins-croises

 



02/11/2020
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