La rentrée des classes - 1968
Merci à graphôsoleil pour ce joli tube
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La rentrée des classes - 1968
La cloche vient de retentir, nous avons tous repéré les classes où notre nom est affiché. Avec deux copines de l’an passé, je viens rejoindre la file, et découvre avec angoisse le visage sévère de celle qui va être ma maîtresse. À cet instant précis, je sais déjà que cette année ne sera pas une réussite. À quoi cela tient-il ?
À son regard froid, à la ligne dure de sa bouche qui semble dire :
« Attendez ! Petits vauriens, je vais vous mâter, moi ! »
Mais ce que l’austère bonne femme ignore, c’est que moi, hormis à la maison où les coups tombent régulièrement, je dis bien moi ! Personne ne peut me mater. Il y a en moi des coulées de lave qui charrient ma colère, ma révolte et qui menacent de m’engloutir à chaque instant, même si je lutte souvent pour que rien ne transparaisse de cette rage qui me secoue parfois.
Nous passons en silence devant elle et pénétrons dans ce qui sera notre classe à compter de ce jour. La pièce est grande éclairée des deux côtés. Du côté couloir, une porte à gauche et sur la droite à environ un mètre de la porte, une succession de vitres qui montre qui passe dans le couloir. La maîtresse nous demande de rejoindre ce couloir où un long portemanteau court sous les vitres. Nous y déposons, à sa demande, nos affaires, manteaux, bonnets, écharpes. Il fait frais en ce début septembre, mais la classe est bien chauffée, nous n’aurons pas besoin de nos vêtements d’automne.
Enfin, nous réintégrons la salle de classe et chacun choisit une place où il passera cette année. Comme à mon habitude, je me dirige vers le fond. J’aime cet endroit d’où je peux tout observer, sans être vu. Les nouveaux camarades en premier, puis les murs de la classe couverts de la carte de France, d’une planche d’oiseaux, de celle d’un squelette, mais surtout et avant tout, ce que j’aime le plus c’est les fenêtres qui font face à celles du couloir et qui me donnent accès à l’extérieur. De mon poste, je vois les nombreux platanes qui ombragent la cour. J’aperçois le ciel bleu ce matin, malgré les nuages épars. Et la cour qui pour la première fois cette année permettra la réunion des garçons et des filles.
D’ailleurs, c’est la première chose incongrue cette année. La présence des garçons qui ricanent entre eux comme des idiots. Quoi que, si je veux rester honnête, de nombreuses filles en font autant. Pas une d’entre nous n’a pris place près d’un gars. Au bout de quelques instants, la classe retrouve son calme. Après l’appel, la maîtresse demande à chacun de nous de remplir une fiche. Nom, prénom, date de naissance, profession du père, de la mère. J’ai horreur de ces fiches qui nous déshabillent à chaque fois. Nous portons tous des blouses qui sont déjà le premier témoin de notre différence sociale. Moi je porte une blouse grise fournie par la mairie, les gosses de riches portent des blouses brodées pour les filles, marines, vert bouteille pour les garçons. Les filles sont toutes en jupe, les garçons en pantalon court ou long. L’autre différence sociale est fournie sur les cartables, trousses et crayons ou stylos. L’école à cette époque nous fournit encore livres et cahiers.
Les deux premières heures passent plutôt vite et nous voilà en première récréation. Je retrouve mes copines et quelques potes de ma cité. Les rires fusent, et les jeux commencent. Et voilà c’est reparti pour une année de plus dans la galère de l’Éducation Nationale.
Maridan Gyres 31/08/2014
Merci à Graphôsoleil dont l’illustration a donné naissance à ce texte.
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